Dans le concept de développement durable, il y a une notion d'équité sociale qui est parfois négligée. Une entreprise qui se dit engagée et responsable doit avoir comme objectif de lutter contre la pauvreté et l’exclusion. Et c’est précisément ce que fait Jute & Cie. Portrait d’une entreprise de chez nous, où l’humain est considéré.
Fondée par deux femmes engagées, Jute & Cie est une entreprise d’insertion. La seule de la région. Ici, on forme et on accompagne des gens qui éprouvent des difficultés à s’intégrer au marché du travail.
Les débuts
Nous sommes à la fin des années 1990. À l’époque, pendant qu’Anne Bellemare collabore à un comité voué à l’implantation d’une première entreprise d’insertion dans la région, Manon Rose tente de sauver la compagnie de fabrication de jute où elle travaille, menacée de fermeture. C’est la rencontre entre ces deux femmes qui mènera à la création de Jute & Cie.
Ensemble, elles ont racheté les équipements de la compagnie de jute et se sont installées, en mai 1999, dans un local loué. Les balbutiements de Jute & Cie ont obligé les deux fondatrices à faire preuve de beaucoup de souplesse et de persévérance. Tout était à bâtir.
« Au commencement, à part les équipements d’usine, elles n’avaient rien. Pas même des crayons, ou un téléphone. Jute & Cie s’est construite au fil du temps, avec ces 2 femmes-là et les 3 premières travailleuses à avoir intégré l’équipe. » Jacynthe Daoust-Roger, intervenante psychosociale
Ces gens qu’on aide
Qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes vivant avec un déficit d'attention ou un trouble anxieux, de gens peu scolarisés, de jeunes adultes démunis face au marché de l’emploi, d’immigrants confrontés à la barrière de la langue… Ils ont souvent en commun d’avoir eu un parcours difficile et d’avoir de la difficulté à garder un emploi. Ils ont besoin de se reprendre en main ou de s'adapter au rythme du travail. Chez Jute & Cie, on les embauche, sans discrimination.
Citons en exemple l’histoire de cet homme dans la trentaine, ancien enfant de la DPJ, aux prises avec divers problèmes rendant son autonomie fragile, qui a appris à se responsabiliser et qui travaille aujourd’hui. Ou encore celle de cette jeune mère monoparentale de 4 enfants, immigrante, qui a trouvé, à la suite de sa démarche, un emploi adapté à sa situation.
La mission de Jute & cie
La vocation première d’une entreprise d’insertion est d’offrir une expérience de travail concrète et rémunérée à des gens pour qui le marché du travail représente un défi. Il existe une cinquantaine d'établissements du genre au Québec et chacun opère dans un secteur défini, que ce soit, par exemple, dans le domaine de la restauration, du vêtement, de l’informatique, ou encore dans le champ manufacturier, comme c’est le cas chez Jute & Cie.
À ses débuts, la petite usine du parc industriel de Sainte-Catherine se consacrait uniquement à la vente de jute. Mais aujourd’hui, l’entreprise s’étant adaptée au marché, on fait surtout affaire avec des sous-traitants pour l'exécution de tâches demandant une manipulation simple et répétitive, comme : mettre des bouchons sur des bouteilles vides, plier et coller des pochettes de carton, encarter des documents pour des imprimeries, etc.
Tous les profits de l’OSBL sont réinvestis dans l’entreprise, en cohésion avec sa mission sociale. Au collectif des entreprises d’insertion du Québec, on explique le modèle d’affaires en le comparant à une entreprise passerelle. Jute & Cie est une transition menant à un emploi. Ici, on permet à des gens d’acquérir des connaissances
« Notre objectif n’est pas de les faire travailler dans une manufacture quand ils sortent d’ici. Notre objectif est de les rendre solides. Nous, on est le médium qui leur donne accès à un emploi où ils seront bien… » Chantal Pérusse, directrice générale par intérim
La directrice rappelle que la porte est toujours ouverte, tant pour d’éventuels travailleurs, que pour des entreprises de la région souhaitant faire appel à leurs services. Elle rêve du jour où un employeur qui ferait affaire avec eux en sous-traitance verrait ses futurs employés être formés chez Jute & cie. Ce qui pourrait représenter une piste de solution à la pénurie de main-d'œuvre.
L’âme de Jute & Cie
Difficile de conclure sans avoir une pensée pour les fondatrices de l’entreprise : Manon Rose, récemment partie à la retraite et Anne Bellemare, décédée à l'automne 2021. Le souvenir d’Anne, et de son grand cœur, reste gravé dans la mémoire de tous.
« Tous ceux qui n'étaient pas dans leurs bottines, elle les ramenait. Sa mission de vie : inclure les exclus. » Chantal Pérusse
Jute & Cie
1505, rue Jean-Lachaîne, Sainte-Catherine, Québec J5C 1C2
450 638-7574